Les Gardiennes

les gardiennesDrame de 2h 14min réalisé par Xavier Beauvois sorti sur les écrans en décembre 2017. Le réalisateur  Des hommes et des Dieux – multi-récompensé au festival de Cannes et au César (2010) –  est aussi un acteur à l’occasion, notamment pour Michel Deville (Aux petits bonheurs, 1994), Jacques Doillon (Ponette, 1996) et Philippe Garrel (Le Vent de la nuit, 1999).  On peut le voir en Louis XVI dans Les Adieux à la reine (2011) de Benoît Jacquot, ou encore, toujours dans de petits rôles, dans Django (2016) de Étienne Comar ou Chocolat de Roschdy Zem la même année.  
Si Nathalie Baye et sa  fille Laura Smet, réunies pour la première fois au cinéma, sont les têtes d’affiche des Gardiennes, c’est Iris Bry qui s’impose comme le personnage principal. Cette dernière, totalement inconnue, n’avait jamais mis les pieds sur un plateau de cinéma avant de décrocher le rôle de Francine d’une manière insolite. C’est par le plus grand des hasards que la directrice du casting, Karen Hottois, rencontre Iris Bry à la sortie d’une librairie. Elle l’arrête et lui demande si elle serait d’accord pour passer des essais. « Cela s’est joué à quelques secondes : un peu plus tôt, un peu plus tard, la rencontre n’aurait jamais eu lieu, et Iris, ce miracle, n’aurait jamais fait de cinéma ! », confie Xavier Beauvois.
Adapté à partir du roman éponyme d’Ernest Pérochon (1924), Les gardiennes est un film féministe sur la guerre, bien que la guerre ne soit jamais montrée explicitement, mais plutôt suggérée.
 
L’histoire : 1915. A la ferme du Paridier, les femmes ont pris la relève des hommes partis au front. Travaillant sans relâche, leur vie est rythmée entre le dur labeur et le retour des hommes en permission. Hortense, la doyenne, engage une jeune fille de l’assistance publique pour les seconder. Francine croit avoir enfin trouvé une famille…

Remplacez sur le champ du travail ceux qui sont sur le champ de bataille !
L’ordre de mobilisation générale est affiché le dimanche 2 août 1914. Dans les campagnes et les villes, le tocsin et le tambour public annoncent la nouvelle. Dans les campagnes, les hommes mobilisés laissent les moissons en cours et partent vers les casernes. Les animaux de bâts (bovins, chevaux) sont réquisitionnés par l’armée. Les chevaux seront attelés et tireront les canons, alors que les bovins seront consommés à raison de près de 35000 par jour.

Le 7 août 1914, René Viviani, le Président du Conseil, qui songe alors à une guerre courte, fait appel aux femmes pour qu’elles achèvent la moisson puis qu’elles entreprennent les travaux de l’automne : «Debout femmes françaises, jeunes enfants, filles et fils de la Patrie. Remplacez sur le champ du travail ceux qui sont sur le champ de bataille ! Préparez-vous à leur montrer, demain, la terre cultivée, les récoltes rentrées, les champs ensemencés ! Il n’y a pas, dans ces heures graves, de labeur infime. Tout est grand qui sert le pays. Debout ! A l’action ! A l’œuvre ! Il y aura demain de la gloire pour tout le monde… »

Il s’agit alors de se substituer toutes affaires cessantes aux millions d’hommes mobilisés juste au moment des récoltes. La France était un pays à forte dominante rurale. La mobilisation a vidé les campagnes de leurs forces vives. Ceux qui restaient se sont retrouvés seuls face aux travaux de la ferme. Les travaux agricoles, auxquels les femmes n’ont pas été préparées, exigent une grande force physique. Elles ont relevé le défi avec beaucoup de courage et c’est à elles qu’il incombe de prendre en charge la vie de la ferme. Elles permettent ainsi de nourrir les civils et les soldats. On les surnomme « les gardiennes« .

Le rôle fondamental que les femmes ont joué dans l’effort n’a pas été reconnu après guerre. Elles n’ont même pas obtenu le droit de vote contrairement aux Britanniques et aux Américaines. La France retrouve son conservatisme et les femmes leur rôle d’avant-guerre d’autant que l’on veut qu’elles fassent des enfants pour remplacer les morts. La guerre n’a pas engendré une rupture psychologique sauf dans une certaine frange de la société.

Le comité de rédac’
septembre 2018

Ciné Goûter


Dimanche 4 novembre  2018

 
à 15h en cafét’

Ce que j’en pense : Ce début de mois de novembre 2018 marque partout en France, les commémorations du centenaire de l’armistice de la Première Guerre Mondiale. Ciné-Goûter a participé à cet hommage en proposant Les Gardiennes, film de Xavier Beauvois, retraçant le destin sur fond de ruralité, de trois femmes confrontées à l’absence  dans la France du début du 20ème siècle, en proie à ce conflit mondial très destructeur. Le point de vue, le rôle indispensable à l’effort de guerre et les espoirs d’émancipation des femmes restées à « l’arrière », dans la tourmente de la Première Guerre Mondiale, ne sont  quasiment jamais montrés. Cet hommage tout en sobriété éclaire ce pan de l’histoire. Par son ampleur esthétique inspirée à la fois par le clair-obscur de Georges de La Tour, par la peinture paysanne de Jean-François Millet et la puissance de ses interprètes, Les Gardiennes se révèle un beau moment de cinéma.

Bande annonce :

 

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